LES MUSÉES, LIEUX D’ACCROCHE SENSIBLES POUR PENSER ET SOIGNER

En Belgique comme à l’étranger, de nombreuses initiatives confirment le potentiel des musées comme lieux et outils de soin, mais aussi de reconstruction du lien social.

Cette dynamique s’inscrit dans les orientations politiques récentes, notamment la Résolution relative à une approche complémentaire culturelle et non médicamenteuse dans le domaine de la santé mentale, adoptée par le Sénat de Belgique le 2 février 2024¹.

Dans cette perspective, les musées se révèlent de véritables lieux d’accroche, tels que définis par le dispositif INAMI² des soins psychologiques de première ligne, inscrit dans le projet de réforme de la santé mentale : des espaces accessibles, familiers et non stigmatisants.

« Le travail en lieu d’accroche est une méthode de travail dans laquelle un prestataire de soins se déplace vers le groupe cible visé.(…) Les interventions peuvent se concentrer sur la promotion de la santé mentale par le renforcement de la résilience, la prévention secondaire et la détection précoce. Le travail en lieu d’accroche se focalise sur les groupes (vulnérables) qui ont plus de difficultés à chercher ou trouver des soins ou à prendre conscience d’un besoin de soins et à le clarifier.³ »

La mobilisation des institutions muséales permet de renforcer la complémentarité entre soin psychologique et médiation culturelle, en développant des actions pluridisciplinaires, préventives et inclusives, au cœur des territoires.

1. Sénat  de  Belgique.  (2024, 2 février). Résolution relative à une approche complémentaire culturelle et non médicamenteuse dans le domaine de la santé mentale.
2. INAMI.Dispenser des soins psychologiques de première ligne via un réseau de santé mentale
3.  INAMI Circulaire Psy-Ort/2024/005 add., 12/06/2024

Les psychologues et orthopédagogues conventionnés dans le cadre des soins psychologiques de première ligne (SPiPL) sont invités à proposer et animer des groupes de soin au sein de musées.

Ces séances peuvent être menées en co-animation avec des professionnels du champ culturel et éducatif (médiateurs, historiens de l’art, conservateurs, artistes, philosophes, anthropologues ou muséologues) spécialisés dans les approches participatives.

Ces groupes proposent un cadre, propice à l’exploration de formes de soin et de prévention innovantes, ancrées dans le lien, la créativité et la rencontre.

Dans un cadre muséal, plusieurs formes sont possibles.

• Parcours émotionnels autour d’œuvres choisies pour susciter la parole ou le souvenir.
• Ateliers d’expression mêlant observation, écriture ou dessin pour favoriser la mise en mots des ressentis.
• Visites thématiques sur la résilience, la nature, le corps ou le temps.
• Temps de partage collectif autour d’une œuvre, d’une salle ou d’un rituel symbolique lié à la collection.

Musée royal de Mariemont, « Atelier Sensibles et sensoriels » avec Claire Xuân.

Musée L, « Ateliers inclusion et créativité » avec Altéo.

Musée L, « Entrer en contact avec les œuvres grâce à des pratiques de yoga doux » avec Géraldine Cloes.

Les interventions communautaires, inscrites dans la logique du dispositif proposé par le SPF/INAMI, constituent des initiatives menées au sein de la communauté.

Encadrées par des psychologues et orthopédagogues conventionnés, elles sont collectives et visent à renforcer la résilience, l’autonomie, l’auto-soin et le bien-être psychique.

Elles favorisent la santé mentale positive et la participation citoyenne, en s’appuyant sur des partenariats locaux et en faisant des musées des lieux d’accroche vivants, ouverts sur la communauté et porteurs de sens.

Dans un cadre muséal, ces actions peuvent prendre des formes variées selon les ressources du lieu et les besoins du territoire :

• Ateliers participatifs, favorisant la rencontre entre habitants, usagers ou publics fragilisés autour d’une œuvre ou d’un thème commun.
• Visites sensibles, ouvertes à tous, invitant à explorer le musée par les émotions, la perception ou la mémoire plutôt que par le savoir.
• Ateliers de sensibilisation, de prévention et de promotion de la santé mentale.

Ancrés au cœur des territoires, les musées sont des lieux de médiation et de rencontre.

Ils disposent de compétences reconnues dans l’accueil, la participation et l’inclusion.

Leurs équipes, formées et attentives à la diversité des publics, au travail collectif et à la construction du lien social, sont également expérimentées dans l’accompagnement de groupes.

Espaces de soin non médicalisés, ouverts à tous et porteurs de sens, les musées offrent un cadre propice à la parole, à l’expression et à l’échange.

Leur architecture, leur muséographie et leurs collections peuvent devenir de véritables supports de médiation, capables de faire émerger l’émotion, la mémoire et le récit de soi — au cœur d’un processus de soin et de reconstruction du lien.

En cela, ils s’affirment comme des acteurs à part entière de la santé mentale positive.

Le dialogue interdisciplinaire entre psychologues/orthopédagogues et professionnels de la culture (médiateurs, historiens de l’art, artistes ou conservateurs…) ouvre un espace commun où soin psychologique et médiation artistique se rejoignent, transformant l’expérience muséale en moment de partage, de bien-être et de reconstruction du lien.

Au-delà de leur contribution au bien-être collectif, ces partenariats offrent aux musées une visibilité renouvelée et une reconnaissance accrue de leur rôle sociétal.

En résonance avec la définition du musée adoptée par l’ICOM¹, ils traduisent un engagement renouvelé en faveur de l’inclusion, de l’éducation et de la participation, tout en consolidant l’ancrage territorial et la relation avec les publics.

Participer à ce type de démarche, c’est affirmer la place du musée comme acteur de santé publique, de cohésion sociale et d’innovation citoyenne.